Introduction
On croit souvent que « appeler » est un petit verbe sans histoire. En réalité, il concentre plusieurs pièges d’orthographe et de conjugaison qui se faufilent partout: doublement de consonnes, futur et conditionnel, réflexif, participes…
Voyons ensemble ce qu’il en est vraiment et comment bien faire.
1) Le doublement du « l » au présent et au subjonctif
Ce qu’on croit: On ne double jamais le « l » dans « appeler ».
Ce qui se passe vraiment: Pour maintenir le son ouvert [ɛ] (comme dans “appelle”), « appeler » double son « l » dans certaines personnes. Au présent de l’indicatif: j’appelle, tu appelles, il/elle appelle, ils/elles appellent. En revanche, nous appelons, vous appelez gardent un seul « l ». Même logique au subjonctif présent: que j’appelle, que tu appelles, qu’il/elle appelle, qu’ils/elles appellent; mais que nous appelions, que vous appeliez restent avec un seul « l ». De façon générale, c’est-à-dire dans les formes dites “fortes” (1re, 2e, 3e pers. du singulier et 3e du pluriel), on double; dans les formes “faibles” (nous, vous), on ne double pas.
Ce qu’il faut faire: Retenez le réflexe suivant:
- « Nous » et « vous » → un seul « l » (nous appelons, vous appelez).
- Le reste au présent/subjonctif → double « l » (j’appelle, qu’ils appellent).
- Exemple pratique: “Aujourd’hui, je l’appelle; demain, nous appelons le client.” À vrai dire, avec ce repère, on évite 80 % des fautes courantes.
2) Futur et conditionnel: « j’appellerai » et « j’appellerais »
Ce qu’on croit: Au futur et au conditionnel, on garde un seul « l »: j’appelerai, j’appelerais.
Ce qui se passe vraiment: Contrairement aux verbes du type « acheter » (j’achèterai), « appeler » double son « l » au futur et au conditionnel: j’appellerai, tu appelleras, il appellera, nous appellerons, vous appellerez, ils appelleront; conditionnel: j’appellerais, tu appellerais, etc. De toute évidence, écrire “j’appelerai” est une erreur fréquente.
Ce qu’il faut faire: Mémorisez la forme du radical futur/conditionnel: « appeller- ».
- Futur: “Je t’appellerai au plus tôt demain matin.”
- Conditionnel: “Je t’appellerais si j’avais ton numéro.”
3) Imparfait, participe présent et gérondif: un seul « l »
Ce qu’on croit: À l’imparfait et au participe présent, on double aussi le « l ».
Ce qui se passe vraiment: À l’imparfait, on garde un seul « l »: j’appelais, tu appelais, il appelait, nous appelions, vous appeliez, ils appelaient. Même chose pour le participe présent et le gérondif: appelant, en appelant. En d’autres termes, le double « l » ne s’invite pas partout: il se cantonne aux formes vues plus haut (présent “fort”, subjonctif “fort”, futur/conditionnel).
Ce qu’il faut faire:
- Imparfait: “Quand j’étais enfant, j’appelais mes amis tous les soirs.”
- Participe présent: “En appelant le service client, vous obtiendrez la réponse.”
- Astuce utile: si vous voyez -ais, -ions, -iez, -ant, pensez “un seul l”. Pour faire court: imparfait et formes en -ant = « appel- ».
4) Participe passé, auxiliaire et accords essentiels
Ce qui se passe vraiment: « Appeler » se conjugue aux temps composés avec l’auxiliaire « avoir »: j’ai appelé, tu as appelé, etc. Le participe passé est « appelé » (un seul « l ») et s’accorde avec le complément d’objet direct si celui-ci est placé avant. Par exemple: “Je l’ai appelée” (COD « l’ » = une femme, placé avant → « appelée »). À première vue, ce point semble technique; en fin de compte, il évite des fautes visibles.
Ce qu’il faut faire:
- Base: “J’ai appelé ma mère.” / “Nous avons appelé les clients.”
- Accord avec COD antéposé: “La personne que j’ai appelée a rappelé.” (“personne” est COD placé avant → “appelée”).
- Ne doublez jamais le « l » au participe passé: pas d’“appellé”.
- Dans l’immédiat, si vous hésitez sur l’accord, reformulez: “J’ai appelé qui ?” Si la réponse (COD) est avant, accordez; sinon, restez à “appelé”.
5) Le verbe pronominal « s’appeler » (je m’appelle…)
Ce qui se passe vraiment: D’une part, l’infinitif est « appeler » avec deux « p » et un seul « l »; d’autre part, au présent, « s’appeler » suit la règle du double « l » vue au point 1 pour les personnes “fortes”: je m’appelle, tu t’appelles, il/elle s’appelle, nous nous appelons, vous vous appelez, ils/elles s’appellent. De fil à aiguille, la faute courante “m’appele” vient d’un oubli du double « l » et parfois d’un « p » en moins.
Ce qu’il faut faire:
- Présentation personnelle: “Je m’appelle Lina. Nous nous appelons souvent entre collègues.”
- Interrogation avec inversion: “Comment t’appelles-tu ?” (t’ + appelles + -tu).
- Impératif: “Appelle-toi au standard avant d’entrer.” / “Appelez-vous si vous arrivez en retard.”
- À long terme, retenez: s’appeler = deux « p » au radical, double « l » aux formes “fortes”.
6) Orthographe: deux « p » toujours, un seul « l »… sauf exceptions
Ce qui se passe vraiment: L’infinitif standard est « appeler » avec deux « p » et un seul « l ». On ne met pas d’accent grave sur « appellent »: il s’écrit “appellent”, pas “appèlent”. De même, “j’appelle” ne prend pas d’accent: pas de “j’appèle”. Quoi qu’il en soit, l’accent grave appartient aux verbes de type « acheter » (j’achète), tandis que « appeler » préfère doubler le « l ».
Ce qu’il faut faire:
- Infinitif: “appeler” (jamais
“apeler”ni“appeller”). - Présent 3e pluriel: “ils appellent” (double « l », pas d’accent).
- Série d’exemples corrects pour ancrer: “Tu appelles”, “Nous appelons”, “J’appellerai”, “En appelant”, “J’ai appelé”.
7) Sens et constructions utiles: téléphoner vs nommer
Ce qu’on croit: « Appeler » veut seulement dire “téléphoner”.
Ce qui se passe vraiment: « Appeler » signifie à la fois “téléphoner à quelqu’un” et “nommer/désigner”. On dit “appeler quelqu’un” (téléphoner), mais aussi “appeler un chat un chat” (nommer franchement), ou “appeler quelqu’un par son prénom”. Sous un autre angle, « s’appeler » signifie “avoir pour nom”: “Je m’appelle Noé”.
Ce qu’il faut faire:
- Téléphoner: “J’appelle le médecin.” (construction directe) / “Je t’appelle ce soir.”
- Nommer/désigner: “On l’appelle ‘le Maestro’.” / “Appelons ce projet Horizon.”
- Réflexif identitaire: “Elle s’appelle Adèle.”
- Par exemple, pour éviter l’anglicisme: dites “Je t’appelle” plutôt que “Je t’appelle à” (pas de préposition ici).
Liste récapitulative
| Idée reçue (Ce qu’on croit) | Conseil utile (Ce qu’il faut faire) |
|---|---|
| On ne double jamais le « l » dans « appeler ». | Doubler le « l » aux personnes “fortes” (présent/subjonctif) et au futur/conditionnel: j’appelle, ils appellent; j’appellerai, j’appellerais. |
| Au futur/conditionnel, on écrit “j’appelerai/j’appelerais”. | Utiliser le radical « appeller- »: j’appellerai, j’appellerais. |
| À l’imparfait et au participe présent, on double le « l ». | Un seul « l »: j’appelais; appelant/en appelant. |
| Le passé composé se forme avec « être ». | Employer « avoir »: j’ai appelé; accorder avec COD antéposé: “La personne que j’ai appelée…”. |
| « Je m’appele » avec un seul « l » et un seul « p ». | « Je m’appelle »: deux « p » au radical, double « l » aux formes “fortes”; nous appelons/vous appelez. |
| L’infinitif “apeler” et “ils appèlent” sont corrects. | Infinitif « appeler » (deux « p », un « l »); “ils appellent” sans accent. |
| « Appeler » signifie uniquement “téléphoner”. | Aussi “nommer/désigner”; constructions: “appeler quelqu’un”, “On l’appelle X”, “Elle s’appelle Y”. |
Conclusion
Pour faire court, « appeler » n’est pas difficile, il est précis. De fil à aiguille, vous avez vu où le « l » se double, quand il reste seul, comment fonctionne le futur/conditionnel, et pourquoi le passé composé prend « avoir ». En fin de compte, appliquer ces points simples permet d’éviter bien des erreurs. Ce qu’on croit souvent vrai ne résiste pas aux faits… et c’est tant mieux pour progresser. Dans l’immédiat, ancrez 3 repères: nous/vous → appelons/appelez; futur/conditionnel → appeller-; infinitif → deux « p », un « l ». À long terme, ces réflexes rendent votre français plus sûr, plus fluide, et surtout plus lisible.